Les rues étaient joyeuses à la libération
Les parisiens trinquaient sur les nappes à carreaux
Pour fêter dignement la fin de l’oppression.
A nouveau sur les toits rayonnaient les drapeaux.
Mais les cris d’allégresse se couvrirent de haine
Lorsque vint la curée aux abords de la Seine.
De nombreux anathèmes fusèrent en taloches
Contre ceux soupçonnés d’avoir servi les boches.
Une femme eut le tort d’avoir offert son cœur
A un homme ennemi, un soldat vert de gris
La vindicte cruelle lui hurla son mépris
Au milieu d’une foule rongée par la rancœur.
Traînée par les cheveux elle fut emmenée
Au centre de la place sous une pluie d’insultes
Pour la faire payer cette vilaine pute
Pour la faire pleurer cette sale traînée.
De force elle s’assit sur un vieux tabouret.
Elle baissa les yeux ne voulant regarder
Les nombreux yeux avides de voir l’humiliation
Qu’elle allait endurer avec résignation.
Par des cliquetis sombres étant apostrophée
Une tondeuse agit, rasant sa chevelure
Le peuple s’en saisit en guise de trophée
Et cracha au visage de cette fille impure.
Elle quitta l’estrade sous tous les quolibets.
Etaient-ils préférables au vulgaire gibet ?
Car l’âme tourmentée d’un douloureux marasme
Fut toujours poursuivie d’injures et de sarcasmes.
Bérengère- 21 janvier 2008